Pendant des décennies, l’Arabie saoudite avait l’un des taux de participation des femmes à la population active les plus bas au monde. En 2018, la proportion de femmes saoudiennes qui avaient un emploi ou qui en recherchaient activement un était de 19,7% de la population adulte de femmes de nationalité saoudienne, notre groupe de discussion pour ce blog (nous ne considérons pas la grande population d’expatriés car ils affichent un comportement du marché du travail très différent). Dans les années précédentes, le taux était beaucoup plus bas et n’avait commencé que récemment à augmenter lentement (voir la figure 1). Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (MENA) ont toujours été à la traîne du reste du monde en ce qui concerne les femmes et le marché du travail, mais même selon ces normes, le taux saoudien est considérablement à la traîne.
Mais au cours des deux dernières années, quelque chose a changé. En un laps de temps relativement court de deux ans seulement, le taux d’activité des Saoudiennes est passé de 20% fin 2018 à 33% fin 2020, c’est-à-dire que la part des Saoudiennes sur le marché du travail a augmenté. par un incroyable 64 pour cent en seulement deux ans!
Les femmes de tous âges rejoignent la population active à des taux plus élevés. Entre la fin de 2018 et la fin de 2020, les augmentations les plus importantes se sont produites chez les femmes saoudiennes âgées de 40 à 54 ans, avec des augmentations de plus de 20 points de pourcentage. La plupart des autres groupes d’âge ont affiché une augmentation d’au moins 10 points de pourcentage. Ce n’est qu’en marge du marché du travail – les travailleurs les plus jeunes et les plus âgés – que l’augmentation a été plus faible, passant d’environ 3 à 5 points de pourcentage. Les femmes moyennement qualifiées sont un autre moteur de cette croissance impressionnante. Ceux qui ont fait des études secondaires ont vu leur participation augmenter de près de trois fois – de 9 à 25 pour cent – au cours de cette période. Les femmes ayant une éducation primaire et intermédiaire sont également entrées sur le marché du travail à des niveaux significatifs, augmentant leurs taux de participation de près de 10 et 12 points de pourcentage, respectivement.
Surtout, cet afflux de femmes saoudiennes sur le marché du travail ne s’est pas traduit par une augmentation du chômage, bien au contraire. Dans la pratique, les nouveaux venus sur le marché du travail passent généralement les deux premières semaines, voire les premiers mois, à chercher du travail – ils font donc partie de la population active, mais ils sont au chômage, ce qui peut augmenter le taux de chômage. Néanmoins, ce que nous observons en Arabie saoudite, c’est que bon nombre de ces femmes qui entrent sur le marché du travail trouvent rapidement du travail. Le taux d’emploi – la part de la population active qui a un emploi – des femmes saoudiennes a augmenté régulièrement de 68 à 76 pour cent entre la fin de 2018 et 2020; et le taux de chômage des femmes a diminué, passant de 32 à 24 pour cent. Peut-être plus important encore, cette augmentation de l’emploi n’a pas été motivée par le gouvernement qui a embauché des Saoudiennes. Il s’agissait d’une véritable croissance de l’emploi tirée par le secteur privé. Entre le début de 2019 et la fin de 2020, l’emploi dans le secteur public des femmes saoudiennes n’a augmenté que de 5% (figure 2). L’emploi des Saoudiennes dans le secteur privé, en revanche, a augmenté dans la plupart des activités économiques, la majorité affichant une augmentation de plus de 10%. L’emploi des femmes dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre tels que la construction, la fabrication, l’hébergement et la restauration a augmenté de 9, 14 et 40 pour cent, respectivement.
Quelles pourraient être les raisons de ces changements dramatiques en Arabie saoudite? Bien que nous n’ayons pas encore de réponse définitive, il ne faut pas sous-estimer l’impact potentiel des nombreuses réformes qui ont facilité le travail des femmes au cours des dernières années. Ces réformes allaient de la possibilité pour les femmes de conduire des voitures (ce qui est essentiel pour pouvoir se rendre au travail) à des modifications de la loi sur la tutelle, du droit du travail et du droit de la famille, entre autres. L’Arabie saoudite était, en fait, l’une des plus performantes dans le rapport sur les femmes, les affaires et le droit 2021 de la Banque mondiale. Il semble que ces réformes commencent à porter leurs fruits. Après tout, le programme de réforme Vision 2030 de l’Arabie saoudite a pour objectif explicite d’augmenter le taux d’activité des femmes à plus de 30%. Pour l’instant, il semble que cet objectif ait été atteint 10 ans plus tôt.
