Gouvernance, insatisfaction des citoyens et niveaux de confiance en Afrique

La pandémie a vu les citoyens se mobiliser pour lutter contre le mécontentement des gouvernements du monde entier. L’Afrique en particulier a connu une augmentation des manifestations dans des pays comme le Nigéria, la Tunisie, le Sénégal, le Cameroun, le Libéria et l’Afrique du Sud, entre autres. En effet, selon le projet sur la localisation des conflits armés et les données sur les événements, «la fréquence des manifestations de masse en Afrique a été multipliée par sept au cours de la dernière décennie». Cette augmentation est visible dans la figure ci-dessous. Alors, qu’est-ce que cela signifie pour l’insatisfaction des citoyens et pour la longévité des changements à l’époque du COVID?

Figure 1. Manifestations à travers l’Afrique

Figure 1. Manifestations à travers l'Afrique

Source: Ordu, A. et Golubski, C. (éd.). (2021). Foresight Africa: les principales priorités du continent en 2021. Washington, DC: Brookings Institution.

Selon une mise à jour de février 2021 du National Democratic Institute, «la pandémie de COVID-19 a mis un stress aigu sur le gouvernement et les acteurs de la société civile», et son impact sera durable. En fait, dans le chapitre 6 de Foresight Africa 2021, la directrice exécutive de la Fondation Mo Ibrahim, Nathalie Delapalme, explore ce point, partageant les résultats de l’Indice Ibrahim de la gouvernance africaine (IIAG), qui mesure et surveille la performance de la gouvernance dans les pays africains. De son point de vue, Delapalme soutient que la participation citoyenne alimente la démocratie mais prévient que la satisfaction des citoyens est, selon l’IIAG, en baisse. En effet, en 2020, la satisfaction des citoyens a atteint son plus bas niveau depuis 2015, une tendance que Delapalme attribue à la méfiance de la jeunesse africaine, illustrée par une augmentation des protestations.

Comme Delapalme l’explique dans son point de vue, les progrès vers une bonne gouvernance ont été variables selon les indicateurs (Figure 2). Par exemple, les progrès des pays africains vers le «développement humain» et les «fondations pour les opportunités économiques» ont non seulement rebondi, mais ont également montré une amélioration croissante au cours des cinq dernières années. Dans le même temps, les performances en matière de «Sécurité et État de droit» et «Participation, droits et inclusion» ont considérablement diminué au cours de la même période.

Figure 2. Pays africains: catégories IIAG, nombre de pays par classification des tendances

Figure 2. Pays africains: catégories IIAG, nombre de pays par classification des tendances

Source: Nathalie Delapalme, «Gouvernance en Afrique: l’insatisfaction des citoyens augmente et le COVID-19 est susceptible d’inverser les progrès récents», dans Foresight Africa: les principales priorités du continent en 2021.

Alors que les pays continuent de lutter contre les défis socio-économiques, les violations des droits de l’homme et les verrouillages controversés, Delapalme avertit qu’une récession imminente liée au COVID «pourrait menacer d’inverser les gains obtenus au cours de la dernière décennie en matière de développement économique et humain, qui jusqu’à présent avaient été les principaux moteurs des progrès globaux de l’IIAG alors que les gouvernements ont acquis une plus grande capacité à fournir des biens et services publics à leur population. »

À l’époque du COVID-19, y aura-t-il donc un renversement des «victoires» pour les pays qui ont progressé dans certains domaines de la gouvernance? Ou le COVID-19 offrira-t-il des opportunités uniques aux pays de créer un tout nouveau système? Delapalme croit avec optimisme en ce dernier, déclarant que «l’histoire nous a appris qu’aucun changement capital n’a jamais eu lieu sans être déclenché ou forcé par une crise majeure». Avec cela, elle espère que le COVID-19 pourra être un catalyseur de changement pour ceux qui en ont besoin.

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