Financer la reprise des pays à faible revenu après le COVID – Blogue du FMI

Par Guillaume Chabert, Robert Gregory et Gaelle Pierre

Bon nombre des pays les plus pauvres du monde sont confrontés à la menace d’une reprise faible et d’un recul dans leur chemin de développement.

Les besoins des pays les plus pauvres au cours des cinq prochaines années sont aigus. Mais ils ne sont pas hors de portée.

Dans notre article, nous estimons que les pays à faible revenu auront besoin d’environ 200 milliards de dollars jusqu’en 2025 pour intensifier leur réponse à la pandémie, et de 250 milliards de dollars supplémentaires pour rattraper les économies avancées. Un montant supplémentaire de 100 milliards de dollars sera nécessaire si les risques identifiés dans le scénario de référence se concrétisent. Répondre à ces besoins exigera une réponse coordonnée, multiforme et forte.

Plusieurs facteurs entravent la reprise économique des pays à faible revenu. Premièrement, ils font face à un accès inégal aux vaccins. La plupart de ces pays dépendent presque entièrement de l’installation multilatérale COVAX – une initiative mondiale visant à un accès équitable aux vaccins dirigée par un consortium d’organisations internationales. COVAX est actuellement prêt à acheter des vaccins pour seulement 20 pour cent de la population des pays à faible revenu. Deuxièmement, les pays à faible revenu ont eu une marge de manœuvre limitée pour répondre à la crise – en particulier, ils n’ont pas eu les moyens de dépenser davantage (voir graphique).

Troisièmement, les vulnérabilités préexistantes, notamment les niveaux élevés de dette publique dans de nombreux pays à faible revenu, et la faiblesse, parfois négative, de la productivité totale des facteurs dans certains pays à faible revenu continuent de freiner la croissance.

Besoins de financement

Notre article fournit une estimation des besoins de financement pour les cinq prochaines années des pays à faible revenu pour sortir de la pandémie et assurer une reprise résiliente, au-delà de ce qui est déjà supposé dans le scénario de référence des Perspectives de l’économie mondiale du FMI.

Dans un premier temps, nous estimons ce qui est nécessaire pour permettre aux pays à faible revenu d’intensifier leur réponse en matière de dépenses au COVID, y compris pour les vaccinations, et de reconstituer ou maintenir des réserves. Notre analyse suggère qu’environ 200 milliards de dollars sont nécessaires pour atteindre ces objectifs.

Dans un deuxième temps, nous estimons le financement nécessaire pour permettre aux pays à faible revenu d’accélérer la convergence avec les économies avancées. Nous constatons qu’il faut 250 milliards de dollars supplémentaires. Si les risques identifiés dans un scénario défavorable se concrétisaient, les besoins de dépenses augmenteraient de 100 milliards de dollars supplémentaires.

Compte tenu du niveau d’endettement de nombreux pays à faible revenu, seule une partie de ces dépenses pourrait être financée par l’emprunt. Mais avec ce financement accru, les pays à faible revenu pourraient reprendre leur chemin de convergence pré-COVID vers les économies avancées d’ici 2025.

Une réponse aux multiples facettes.

Répondre à ces besoins de financement supplémentaires nécessitera une réponse multiforme avec trois composantes principales. Premièrement, veiller à ce que les pays à faible revenu se rétablissent pleinement exigera un soutien important de la communauté internationale. Assurer une production mondiale adéquate de vaccins et une distribution universelle à des prix abordables sera décisif.

En outre, il sera essentiel de déployer un ensemble financier complet, comprenant des subventions et des financements concessionnels, et un allégement de la dette le cas échéant. Le FMI et les banques multilatérales de développement joueront un rôle clé dans ce paquet.

Deuxièmement, un ambitieux programme de réformes internes est nécessaire pour les pays à faible revenu afin de stimuler la compétitivité et la croissance potentielle. Cela comprend l’amélioration de la gouvernance et du climat des affaires, le renforcement de la mobilisation des recettes nationales, le développement des marchés financiers nationaux et l’amélioration de la gestion économique et financière.

Ces réformes devraient, à leur tour, stimuler la troisième composante de la réponse multiforme: la promotion du secteur privé national et du financement privé extérieur.

Le FMI participera à part entière à cette réponse et a déjà lancé plusieurs mesures de soutien à ses membres à faible revenu à travers:

  • Élargir l’accès aux ressources concessionnelles dans le cadre du Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et la croissance, notamment en élargissant l’accès au financement d’urgence. De mars 2020 à mars 2021, environ 13 milliards de dollars ont été approuvés dans plus de 50 pays à faible revenu. Le FMI est également en train de revoir son cadre de prêt aux pays à faible revenu, au-delà de l’augmentation temporaire des limites d’accès.
  • Proposition d’une nouvelle attribution de droits de tirage spéciaux. Le soutien se renforce parmi les membres du FMI pour une éventuelle allocation de DTS de 650 milliards de dollars. Cela aiderait à répondre au besoin mondial à long terme d’avoirs de réserve et fournirait une augmentation substantielle des liquidités à tous les membres.
  • Allégement du service de la dette par le biais du Catastrophe Containment and Relief Trust à 29 pays éligibles. La troisième tranche récemment approuvée couvrant la période avril-octobre 2021 porte l’allégement total du service de la dette à 740 millions de dollars depuis avril 2020. Cet allégement permet aux pays pauvres d’augmenter leurs dépenses dans les domaines prioritaires pendant la pandémie.
  • Soutenir une nouvelle prolongation de l’Initiative de suspension du service de la dette du G-20 (DSSI) jusqu’à fin décembre 2021. La DSSI a accordé 5,7 milliards de dollars américains d’allégement du service de la dette à 43 pays en 2020 et devrait fournir jusqu’à 7,3 milliards de dollars de dette supplémentaire suspension du service jusqu’en juin 2021 pour 45 pays.

Les besoins des pays les plus pauvres au cours des cinq prochaines années sont aigus. Mais ils ne sont pas hors de portée. Un ensemble solide, coordonné et complet est nécessaire. Cela garantira une reprise rapide et une transition vers une croissance verte, numérique et inclusive qui accélérera la convergence des pays à faible revenu vers leurs homologues de l’économie avancée.

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