Démêler les revendications pour (et contre) la croissance verte

Il est clair que plus l’économie grandit, plus il est difficile de dissocier la croissance de ses impacts matériels… Cela ne veut pas dire que le découplage lui-même est soit inutile, soit impossible. Au contraire, il est essentiel de dissocier le bien-être du débit matériel si les sociétés veulent assurer une prospérité plus durable – pour les personnes et pour la planète. Cet article a été écrit pour le Magazine scientifique.

Article de TIM JACKSON et PETER VICTOR

L'économiste américain Kenneth Boulding a ironisé: «Quiconque croit qu'une croissance exponentielle peut durer éternellement dans un monde fini est soit un fou, soit un économiste» (1). Il témoignait devant le Congrès américain en 1973, à la suite du premier rapport du Club de Rome, extrêmement influent et provocateur, Les limites de la croissance (2). La remarque a survécu jusqu'à ce jour en tant que commentaire quelque peu satirique sur la profession économique, mais elle a également une certaine logique interne et fournit un point de départ utile pour réfléchir aux «guerres de découplage» qui ont tendance à être combattues autour de la compatibilité entre la croissance économique et limites environnementales (3).

Lorsque les économistes soutiennent que la croissance peut se poursuivre indéfiniment, c'est parce qu'à leur avis, la croissance est quelque chose de mesuré en termes de valeur économique plutôt que de débit matériel. La mesure de production préférée des économistes – le produit intérieur brut (PIB) – est libellée en valeur monétaire plutôt qu'en poids matériel. Ces éléments, selon eux, sont séparables: en se découplant les uns des autres, les économies devraient pouvoir échapper à la domination des limites finies au moins à un degré pertinent (sinon littéralement pour toujours) (4).

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